De quoi déculpabiliser les parents qui craignent avoir mal fait quelque chose…
Il est fréquent que le bégaiement apparaisse brutalement (dans 50% des cas). L’enfant se met à bégayer du jour au lendemain. Cela peut être très déstabilisant pour les parents. Si l’apparition a lieu suite à un événement de vie particulier (suscitant des émotions fortes) comme la naissance d’un petit frère ou d’une petite sœur, un déménagement, …le raccourci est vite fait dans la tête des parents : « mon enfant s’est mis à bégayer à cause du déménagement » et la culpabilité peut alors être forte.
Vous pouvez alors simplement leur expliquer que les événements de vie, les émotions peuvent précipiter l’apparition du bégaiement, mais dans le bégaiement il y a des prédispositions génétiques. Ces événements ne sont donc pas des causes, mais plutôt des facteurs qui vont précipiter l’apparition du trouble. Cela permet souvent de faire baisser la culpabilité, ce qui est un bon début pour la prise en charge 😉
Voici un petit coup de projecteur sur les origines génétiques.
Les études en génétique montrent très clairement que la prédisposition génétique est avérée dans le bégaiement.
Plusieurs types d’études existent :
1- Celles sur les jumeaux et les histoires familiales rapportant plusieurs cas de bégaiement ;
Les études montrent bien des histoires familiales de bégaiement, et les études sur les jumeaux confirment la prédisposition génétique.
Par ailleurs, des études ont été faites sur des enfants adoptés par des parents qui bégaient. Ces enfants ne se mettent pas à bégayer. Ainsi, le bégaiement ne s’attrape pas par imitation ! Cela peut être important de le préciser aux parents
2- Celles qui permettent d’identifier les chromosomes porteurs de gènes responsables du bégaiement ;
De nombreuses études ont été faites sur des familles de personnes qui bégaient au Cameroun (Drayna, 1997 ; Riaz et al., 2013), au Pakistan (Riaz et al., 2005 ; Raza et al., 2010, 2012) ; aux USA, en Suisse et à Israël (Suresh et al., 2006). Plusieurs chromosomes ont été identifiés comme étant impliqués dans le bégaiement. Et notamment il a été montré que le chromosome 9 est lié au bégaiement transitoire, et le 15 au bégaiement persistant. Ainsi, le caractère persistant ou transitoire du bégaiement serait codé génétiquement (Guitar, 2019). Donc le jour du bilan, il est très important de demander :
- s’il y a du bégaiement dans la famille,
- si la ou les personnes concernées ont récupéré ou pas
- et si elles ont récupéré : demander comment : avec ou sans prise en charge
3- Enfin, celles qui essaient d’identifier les gènes responsables Kang et al., 2010 ; Riaz et al., 2005; Raza et al., 2013 ;, Raza et al., 2016 ; Raza et al., 2015).
Quatre ont été identifiés à ce jour, dont des mutations de 3 gènes portés par le chromosome 12 GNPTAB, GNPTG, NAGPA ; et le gène APAE. Les futures recherches permettront certainement d’identifier plus de gênes.
Il existe très certainement des sous-groupes de bégaiement définis en fonction de ces mutations génétiques.
En fonction de la mutation génétique portée, le bégaiement serait plus ou moins résistant au traitement basé sur le « fluency shaping » (remodelage de la parole) Frigerio et al. (2019).